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La terre sainte en deuil ne fête pas Noël

Pas de sapin gigantesque, pas de crèche flamboyante, pas de joie ! Un voile de tristesse enveloppait dimanche Beit Lehm, qui se pare habituellement de ses habits de fête à l’occasion de Noël, terni cette année par la guerre dans la bande de Gaza. Peu de fidèles et de touristes étaient attendus au cours de la journée et à la messe de minuit dans la ville palestinienne en Cisjordanie occupée, qui selon la tradition chrétienne a vu naître Jésus-Christ. Les touristes ont fui la région depuis le début de la guerre menée par l’état hébreu contre le peuple palestinien depuis le 7 octobre. Les chrétiens palestiniens n’avaient, eux, pas le cœur aux célébrations, ne pouvant rester indifférents au sort de leurs concitoyens, assiégés et bombardés à Gaza. « Ils sont nombreux à mourir pour cette terre, c’est très difficile de célébrer quelque chose alors que notre peuple se meurt », estime Nicole Najjar, étudiante de 18 ans, sur la place de la Mangeoire désertée. Face à la basilique de la Nativité, une oeuvre d’art évoquant le drame de Gaza a été installée à terre, en lieu et place de la crèche grandeur nature et du colossal sapin: Marie et Joseph, statues grises, au milieu d’un fatras de débris et de tôle, derrière des barbelés. Sur l’immeuble d’à côté, une grande banderole: « Arrêtez le génocide, arrêtez le déplacement, levez le blocus »: « les cloches de Bethléem sonnent pour un cessez-le-feu à Gaza ». Dans le territoire palestinien, gouverné par le Hamas, des chrétiens, dont le nombre est estimé à un petit millier, ont pris refuge dans des églises qui n’ont pas été épargnées par les combats. La semaine dernière, une mère et sa fille ont été tuées par des tirs israéliens dans l’enceinte de l’église de la Sainte-Famille dans la ville de Gaza, selon le patriarcat. Le pape François a dénoncé l’acte qu’il  a qualifié de terrorisme et parlé de bombardements et des tirs ciblant « des civils sans défense». Quant au président français Emmanuel Macron, il a exprimé au patriarche latin de Jérusalem « sa vive préoccupation » face à « la situation dramatique » de cette église où les deux femmes ont été tuées « de manière indigne », a indiqué dimanche l’Elysée. Le patriarche, Pierbattista Pizzaballa, a déclaré dimanche, à son arrivée à Bethléem, qu’il fallait « mettre un terme aux hostilités car la violence n’engendre que la violence ». « Le message de Noël n’est pas celui de la violence mais de la paix, nous voulons la paix, surtout pour les Palestiniens qui attendent depuis trop longtemps », a-t-il dit, keffieh noir et blanc autour du cou. « Cette année est différente des autres, elle est faite de tristesse, de chagrin, de destruction, de privation et de perte », se désole Mervat Murra, 50 ans, créatrice de mode à Bethléem. La parade de scouts, qui réveille habituellement la ville à coups de cornemuses et tambourins, a laissé place à un défilé silencieux. « Nous voulons la vie, pas la mort », proclamait une des banderoles tenues par des enfants. Dans la matinée, un immense drapeau palestinien a été déplié sur la place de la Mangeoire, tenu par chaque bout par des adultes et des enfants, chrétiens et musulmans. Autour de la place de la Mangeoire, la famille Giacaman a ouvert son magasin de crèches et autres objets d’art liturgique pour la première fois depuis le 8 octobre, sans illusion. « Personne ne viendra, on a ouvert parce qu’il le faut, c’est Noël », dit Amir Giacaman, 29 ans. « Nous n’avons pas le goût aux célébrations alors que Gaza connaît un génocide et même ici en Cisjordanie, nous pleurons de jeunes gens tués par les Israéliens et d’autres détenus chaque jour », dit à l’AFP Mitri Raheb, pasteur d’une église luthérienne de Bethléem. Les hostilités à Gaza ont fait tâche d’huile en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par l’entité sioniste depuis 1967, où plus de 300 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre par des tirs de soldats ou de colons sionistes. « Tout ce que nous voulons pour Noël c’est un cessez-le-feu, durable, pour mettre fin à cette atrocité », dit Mitri Raheb. « Beit Lehm a donné Jésus au monde. Il est grand temps que le monde donne la paix à Beit Lehm et à Gaza.

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