Économie

La perspective des premières baisses reportée à un avenir lointain : Les banques centrales mondiales réticentes quant à la réduction de leurs taux

La tendance à la fermeté est liée à «une réelle incertitude sur le niveau de l’inflation l’année prochaine» et la décision des instituts d’émission «reflète un compromis entre croissance et inflation», a indiqué Fabio Balboni de HSBC. Les banques centrales ont-elles fini de relever les taux d’intérêt pour endiguer l’inflation ? L’incertitude demeure mais les institutions monétaires conviennent de reporter la perspective des premières baisses à un avenir lointain. La Réserve fédérale américaine (Fed) a ainsi maintenu cette semaine, comme l’espéraient les marchés, ses taux à leur niveau actuel (fourchette de 5,25 à 5,50%). Une décision qui pourrait laisser espérer que la courbe des taux ait atteint un sommet, avant de redescendre, mais la Fed a créé la surprise en annonçant qu’une nouvelle hausse aurait lieu avant la fin de l’année 2023. Elle a également précisé, au grand désarroi des investisseurs, que les taux devraient alors baisser moins vite que prévu (ils seraient désormais attendus à 5,1% en 2024, contre 4,6% auparavant). La raison invoquée ? L’économie américaine se porte mieux que prévu – la Fed a doublé sa prévision de croissance pour 2023 – ce qui fait craindre une reprise de l’inflation si les taux baissent trop rapidement. La Fed a ainsi adopté une ligne plus ferme que prévu. Une position partagée par d’autres banques centrales, comme celle de Norvège : sa hausse de taux jeudi était anticipée, mais elle a aussi prévenu qu’un nouveau tour de vis était «probable» en décembre, et exclu a priori un assouplissement de l’année prochaine. Ce ton ferme «a surpris les marchés», qui avaient «décidé que le pic» des hausses de taux «a lieu en ce moment», décrypte Fabio Balboni, économiste chez HSBC, même si «la communication des banques centrales laisse la porte ouverte» à la possibilité de les augmenter encore. Ceci est lié, selon lui, à «une réelle incertitude sur le niveau de l’inflation l’année prochaine». Et leur décision «reflète un compromis entre croissance et inflation». Les augmentations de taux augmentent en réalité le coût du crédit pour les entreprises et les consommateurs. Théoriquement, cela réduit la demande, et donc les pressions inflationnistes. Mais si la demande ralentit trop, nous courons le risque d’une récession. Face à ce dilemme, la Banque centrale européenne (BCE) s’est finalement prononcée en faveur de l’option limitant l’inflation et a procédé à une dixième hausse consécutive de ses taux, portant son taux d’intérêt de référence à 4,0%, un plus haut depuis 1999. «On ne peut pas dire que nous avons atteint le sommet», a déclaré sa présidente Christine Lagarde. Les responsables de la BCE ont toutefois signalé que son cycle de resserrement monétaire touchait à sa fin, sans pour autant fermer complètement la porte à une nouvelle hausse si la situation l’exigeait. Par ailleurs, la BCE maintiendra ses taux directeurs «à des niveaux suffisamment restrictifs aussi longtemps que nécessaire», a rappelé l’économiste en chef de l’institution, Philip Lane, dans un discours prononcé jeudi à New York. Certains signes indiquent cependant que les banques centrales ont atteint le point culminant de leur resserrement monétaire. La Banque d’Angleterre (BoE) a déjà pris une tournure inattendue jeudi en annonçant une première pause depuis décembre 2021, après un léger repli mardi de l’inflation britannique en août. Cette décision ne s’est pas accompagnée d’un discours aussi ferme que celui de la Fed. La Suisse et le Japon ont également choisi de ne pas augmenter leurs taux, l’institution japonaise ayant même réaffirmé vendredi qu’elle n’hésiterait pas à prendre de nouvelles mesures d’assouplissement monétaire si nécessaire. Au total, la moitié des banques centrales ont choisi ces dix derniers jours d’appuyer sur le bouton pause. “Nous nous attendons à ce qu’il n’y ait plus de hausses de taux à l’avenir” pour la Fed, la BCE et la BoE, affirme Fabio Balboni. Jennifer McKeown, de Capital Economics, prévoit que des «augmentations finales» se produiront au quatrième trimestre. Ensuite, «à l’approche de 2024, le cycle de la détente va s’installer», estime-t-elle. Mais alors, quand les taux vont-ils enfin baisser ? «A la même période l’année prochaine, nous prévoyons que 21 des 30 principales banques centrales réduiront leurs taux d’intérêt», a écrit Mme McKeown dans une note. M. Balboni se montre plus prudent : «Dans ce contexte de faible croissance, il sera très compliqué de baisser les taux alors que l’inflation» reste «trop ​​élevée». Selon lui, la première réduction aura lieu aux Etats-Unis au troisième trimestre 2024». Pour le reste du monde, il faudra attendre 2025.

R.E.

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