Culture

Maïmouna Doucouré, réalisatrice : «Passer par le cœur pour atteindre l’esprit»

Après des études de biologie, Maïmouna Doucouré n’imaginait pas être destinée au cinéma. Née en France au sein d’une famille nombreuse originaire du Sénégal, elle grandit dans un quartier populaire et c’est en 2013 que sa carrière de réalisatrice est lancée, lorsqu’elle gagne un prix pour Cache-cache, son premier court métrage amateur, au Festival Génération Court d’Aubervilliers. Par la suite, elle réalise son premier court métrage professionnel, «Maman(s)», sorti en 2015, et inspiré de sa propre vie. Devenue cinéaste reconnue, elle a fait partie, en mai dernier, du jury «Un certain regard» au 77e festival de Cannes. Quand Maïmouna Doucouré se lance dans le cinéma, elle découvre que sa voix compte et qu’avec son art, elle peut changer le monde : «Étant une réalisatrice, j’utilise ce vecteur-là pour pouvoir exprimer des choses, et surtout pour avoir un impact dans la société qui permet de faire réfléchir, qui permet, en quelque sorte, de passer par le cœur pour atteindre l’esprit». À l’époque, elle n’imaginait pas qu’elle deviendrait une grande réalisatrice.  «Je me sens vraiment reconnaissante d’avoir osé, d’avoir sauté le pas, parce qu’au début, moi, je ne pensais pas que le cinéma m’était destiné», se rappelle-t-elle. Son premier court métrage professionnel, inspiré de sa propre vie, a tourné dans plus de 200 festivals. Il a gagné des prix, y compris en Chine et en Irak, après avoir récolté le César du meilleur court métrage : «Ce qui est intéressant, c’est qu’au départ, quand je me suis lancée dans le cinéma, je ne pensais pas que m’inspirer de ce que j’ai pu vivre pouvait être suffisamment intéressant, je me disais : qui ça va intéresser de partir sur une histoire qui m’appartient — donc l’histoire de ma famille ?». Dans «Maman(s)», elle raconte l’histoire de la jeune Aïda, qui cherche à se débarrasser de la femme que son père ramène à la maison à son retour du Sénégal. «J’ai vraiment eu la preuve du contraire en réalisant mon premier court métrage professionnel, « Maman(s) », poursuit la réalisatrice, et c’est là où j’ai compris finalement qu’en étant intime, quelque part, ça nous permettait d’être universel. Et c’est ça que je trouve beau avec le cinéma.» Puis Maïmouna Doucouré passe à un format plus long. Pour «Mignonnes», son premier long métrage, le propos s’inscrit dans la continuité des deux précédents films. Hawa, son second long métrage, tourne autour du féminin et dénonce l’injustice : «Quand j’étais plus jeune, c’est vrai que j’étais témoin de beaucoup d’injustices que vivaient les femmes, et c’est quelque chose qui m’a beaucoup révoltée. Ce sentiment, j’ai grandi avec. Donc aujourd’hui, j’ai ce moyen d’expression, je suis vraiment partie de mon vécu, ma double culture, les injustices que j’ai pu observer par rapport aux femmes, mon rapport avec ma mère, parce qu’on n’a pas la même vision sur ce qu’être une femme, témoigne-t-elle. C’est vrai que mettre en avant des histoires de femmes dans mes films, c’est quelque chose qui m’importe beaucoup, de par mon histoire, de par mon parcours». Maïmouna Doucouré se penche actuellement sur son prochain film, et c’est encore d’une figure féminine qu’il s’agit : la légendaire Joséphine Baker. «Cela fait sens parce que, quand on voit les combats qu’elle a menés, on se sent investi d’une mission. Raconter Joséphine, ou en tout cas être un témoin de sa vie, ne peut que nous donner envie de reprendre le flambeau de tous les combats qu’elle a pu mener contre l’injustice, contre le racisme, contre la ségrégation, pour justement l’égalité et l’unité entre les peuples.» Un film qui sera co-écrit avec le scénariste Olivier Lorelle, auteur du film Indigènes.

 

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